SCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE
- Série S -
Asie, juin 2001
Corrigés
Sujet
Histoire et évolution de la Terre et des êtres vivants
Le Chimpanzé est le grand singe avec lequel l’Homme est le plus
étroitement apparenté. Ces deux primates partagent un ancêtre
commun daté d’environ – 5 à – 6 millions d’années.
L’hominisation est l’acquisition, à partir de cet ancêtre
commun, de caractères propres à l’Homme.
Exposez les arguments chromosomiques et moléculaires qui permettent
d’établir cette étroite parenté et présentez
les caractères morphologiques et anatomiques spécifiques
à l’espèce humaine.
Introduction
La lignée humaine est considérée comme une des
branches de l’arbre phylogénétique des primates ayant divergé
de celle des grands singes à partir d’un ancêtre commun daté
de 5 à 6 millions d’années (Ma). Cette divergence est la
conséquences d’innovations génétiques détectables
au niveau moléculaire et accompagnées de modifications chromosomiques.
Elles ont entraîné des modifications morphologiques et anatomiques
caractéristiques avec des conséquences remarquables (langage
articulé, outils, organisation sociale). Le chimpanzé n’a
pas subi une évolution aussi remarquable et ses caractéristiques
morphoanatomiques sont plus proches de celles de l’ancêtre commun.
Nous examinerons successivement ces différents points.
Arguments moléculaires
Toutes les molécules informatives apportent des arguments prouvant
la parenté de l’homme et des grands singes, en particulier du chimpanzé,
le plus proche génétiquement. On estime en effet à
plus de 98 % l’identité génétique entre homme et chimpanzé
et le séquençage des génomes devrait permettre de
connaître très précisément cette valeur. Une
telle similitude génétique se traduit dans les protéines
et l’homme et le chimpanzé expriment un répertoire protéique
quasi identique comme le montre l’électrophorèse de liquides
biologiques (sang) ou d’extraits de tissus. Il s’agit de protéines
homologues (hémoglobine, enzymes, etc.) qui présentent en
outre un degré élevé d’homologie de séquences.
En outre, la distance immunitaire est faible. C’est à dire que les
réactions immunitaires croisées sont moins intenses entre
homme et chimpanzé qu’avec tout autre primate. Finalement, il existe
une très forte identité moléculaire entre les deux
lignées. Les faibles différences entre les séquences
de gènes et des protéines sont dues à la courte durée
d’évolution depuis que les gènes ont été hérités
de l’ancêtre commun et attestent de l’étroite parenté.
Les enseignements des caryotypes
L’examen des caryotypes, photographie ordonnée des chromosomes,
montre que le nombre diploïde de chromosomes est de 48 chez le Chimpanzé
et de 46 chez l'Homme. L’aspect des chromosomes lorsqu’ils sont colorés
par bandes montre que l’un des chromosomes humains résulte de la
fusion de deux chromosomes de Chimpanzé en un seul. D'autre part,
plus de la moitié des chromosomes sont identiques chez les deux
espèces et les autres résultent pour la plupart de simples
remaniements de segments homologues parfaitement identifiables par la coloration
des bandes. C’est un exemple de « bricolage moléculaire »
où les mêmes éléments sont arrangés différemment.
Ainsi, des modifications majeures conduisant à une nouvelle lignée
ayant connu un grand succès évolutif ne correspondent pas
nécessairement à des différences génétiques
majeures. Les différences morphoanatomiques entre les deux espèces
sont d’ailleurs limitées comme on va le voir.
Caractères morphologiques et anatomiques spécifiques
Les deux traits majeurs de l’hominisation sont la bipédie et
le développement du cerveau.
Station bipède
Contrairement au chimpanzé qui utilise deux modes de locomotion
hérités de l’ancêtre commun, la brachiation dans les
arbres et une marche quadrupède sur le sol, l’homme a une station
bipède. Le chimpanzé est capable de se tenir debout momentanément,
mais il ne peut pas maintenir cette position. Cette différence est
liée aux caractéristiques du squelette, notamment la colonne
vertébrale qui comporte 4 courbures, la structure élargie
du bassin, l’articulation du fémur sur le bassin et l’articulation
du genou. Le pied a perdu son caractère préhensile. Ces caractéristiques
anatomiques permettent la station debout, la marche et la course. Elles
s’accompagnent d’une position du trou occipital déplacée
vers l’avant par rapport au chimpanzé et de membres de longueur
différente (longues jambes, bras plus courts). La main est ainsi
libérée de la locomotion.
Volume cérébral
L’homme est caractérisé aussi par un cerveau beaucoup
plus gros que celui du Chimpanzé (1500 cm3 contre 450 cm3). Cet
accroissement est parallèle à une réduction du prognathisme
et a été à l’origine de bien d’autres caractéristiques
humaines, notamment la culture. Une des caractéristiques essentielles
de l’homme est en effet sa capacité à fabriquer des outils
et à transmettre son savoir-faire au cours des générations.
Ceci n’a été possible qu’en raison du développement
d’un langage articulé, autre caractéristique humaine liée
notamment à une anatomie particulière du larynx.
Conclusion
L’homme et le chimpanzé sont étroitement apparentés
comme le montre leur quasi identité génétique et chromosomique.
Pourtant, même si les différences morphologiques et anatomiques
qui les séparent, bipédie et développement du cerveau,
sont quantitativement mineures, elles ont eu des conséquences majeures
comme le langage, la pensée logique et la culture.
Sujet
Fonctionnement d’un système de régulation
Introduction
Chaque nouveau cycle ovarien commence quand apparaissent les règles.
En effet, celles-ci sont la conséquence de l’effondrement de la
muqueuse utérine qui se produit si aucun embryon ne s’y développe
et qui marque la fin du cycle utérin. L’analyse des deux documents
va nous permettre d’expliquer les mécanismes hormonaux de la reprise
d’un cycle ovarien, à la date du premier jour des règles,
en faisant appel à quelques connaissances complémentaires
lorsque ce sera nécessaire.
Modifications hormonales en fin de cycle
Le document 1 montre l’évolution de la sécrétion
des hormones hypophysaires et ovariennes au cours d’un peu plus de deux
cycles. À la fin de la phase lutéale du cycle, à partir
de J23, par exemple, on constate que la concentration des gonadostimulines
hypophysaires, FSH et LH, tend vers une valeur minimale, environ 8 mIU.mL-1
atteinte à J26 pour la FSH et à J27 pour LH. En même
temps la concentration en hormones ovariennes, œstradiol et progestérone,
tend vers zéro. Dès le dernier jour du cycle, on observe
une reprise de la sécrétion des gonadostimulines qui se poursuit
pendant les premiers jours de la phase folliculaire pour atteindre quelque
15 mIU.mL-1 vers J9. La simultanéité de l’arrêt
des sécrétions ovariennes et de la reprise des sécrétions
hypophysaires se répète à chaque cycle ovarien. On
peut penser qu’il y a une relation de cause à effet entre les deux.
Origine hormonale de la reprise des gonadostimulines
On sait que les hormones ovariennes, la progestérone mais aussi
des concentrations modérées d’œstradiol, exercent une rétroaction
négative sur l’activité de l’axe hypothalamohypophysaire.
Or, à la fin du cycle, leur concentration chute ce qui pourrait
expliquer la reprise de l’activité de sécrétion de
FSH et LH par l’hypophyse en raison de la levée de l’inhibition.
Le document 2 en apporte la preuve expérimentale. On supprime le
corps jaune trois jours avant la fin d’un cycle et on le remplace dans
un lot d’animaux par un implant de progestérone et dans un autre
lot par un implant vide. On constate dans le premier cas une sécrétion
très faible de LH (environ 1 ng.mL-1) associée
à un niveau de progestérone de 4 ng.mL-1 dû
à l’implant tandis que quand la capsule est vide la chute de la
concentration en progestérone due à l‘ablation du corps jaune
s’accompagne d’une augmentation rapide de LH jusqu’à 5 ng.mL-1
en deux jours. Ceci confirme que la reprise de la sécrétion
de LH est due à la chute de la progestérone. En fait, il
en est de même pour la FSH et l’œstradiol dont les profils de sécrétion
sont similaires à ce stade. Ainsi, que ce soit expérimentalement
(ablation du corps jaune) ou physiologiquement (involution du corps jaune
à la fin du cycle), la chute de la sécrétion de progestérone
induit la reprise de la sécrétion des gonadostimulines.
Conclusion
La reprise d’un cycle ovarien au moment des règles est donc
provoquée par la levée de l’inhibition exercée jusqu’à
ce moment par les hormones ovariennes sur l’axe hypothalamohypophysaire.
Lorsque le corps jaune involue en raison de la diminution de la sécrétion
de LH, il cesse de sécréter de la progestérone. Il
en résulte une reprise d’activité de l’axe hypothalamohypophysaire
avec sécrétion de Gn-RH hypothalamique et de gonadostimulines
hypophysaires. Un nouveau follicule est dès lors activé entamant
un nouveau cycle.
Sujet
Mécanismes de l’immunité
Chez un très jeune enfant souffrant d’une maladie immunitaire
rare, on a fait un essai de thérapie génique.
À partir de l’analyse des documents fournis, indiquez les causes
de la maladie et discutez l’efficacité du traitement effectué.
Introduction
Lorsqu’un déficit immunitaire d’origine génétique
se traduit par l’absence de lymphocytes T (LT), il est particulièrement
grave puisque les LT4 sont à l’origine de l’induction et de l’amplification
des réponses immunitaires spécifiques et que les LT8 sont
nécessaires à l’immunité cellulaire. Nous verrons
qu’un tel déficit a pu être corrigé chez un enfant
par thérapie génique en introduisant le gène adéquat
dans des cellules souches des LT.
Nature du déficit immunitaire
Le document 1 présente le tableau d’un déficit immunitaire
sévère associant affections parasitaires (P. carinii,
mycoses) et infections diverses. En effet, l’immunité cellulaire
comme l’immunité humorale sont absentes puisqu’il n’y a pas de lymphocytes
T et pas d’anticorps. La présence de LB à une concentration
normale montre que l’absence d’immunité humorale est due à
l’absence de LT4, lymphocytes auxiliaires nécessaires à l’activation
des LB. L’immunité cellulaire, qui nécessite également
des LT4, est aussi privée de cellules effectrices, les LT8 ou LT
cytotoxiques. Le tableau d’infections multiples, notamment opportunistes,
est donc dû à l’immunodépression totale résultant
de l’absence de LT.
Traitement et résultat clinique
Le document 2 présente le principe de la thérapie génique
utilisée. Le gène codant la synthèse d’une protéine
membranaire nécessaire à la formation des LT à partir
de leurs cellules souches et destiné à suppléer le
gène inactif chez l’enfant malade a été introduit
dans des cellules souches de façon à en modifier le génome.
Les cellules transformées, c’est à dire exprimant la protéine,
vraisemblablement un récepteur de signaux de différenciation,
sont réinjectées chez l’enfant malade. Le document 3 montre
que le traitement a été efficace et a restauré une
immunité normale. En effet, la concentration en anticorps chez l’enfant
traité atteint 323 mg.dL-1 six mois après le traitement,
à peine inférieur au taux d’anticorps chez un enfant qui
en a toujours fabriqué (> 400 mg.dL-1, document 1). En
outre, à la suite de trois vaccinations différentes, le taux
d’anticorps atteint des valeurs très élevées montrant
que les LT se sont multipliés chez l’enfant malade et sont capables
de stimuler fortement la production d’anticorps, de 2 à 4 fois plus
que chez un enfant non malade selon le vaccin.
Discussion
Le document 2 montre que le nombre de LT dans le sang du malade traité
a augmenté rapidement après le traitement, atteignant le
taux subnormal de 1 800 LT/µL au bout des six premiers mois. Ceci
correspond à un nombre total de LT égal à 9.109
pour 5 litres de sang alors que 108 cellules transformées
ont été injectées. Les LT se sont donc différenciés
et multipliés. Ceci explique les niveaux quasi normaux d’anticorps
mesurés et montre qu’il existe de nouveau une réponse aux
germes de l’environnement. En outre, après les vaccinations, le
nombre de LT augmente encore pour atteindre une valeur physiologique (3
100/µL). Ceci montre que des réponses spécifiques avec
production de LT et d’anticorps se développent après les
stimulations vaccinales. Ainsi, la restauration du système immunitaire
a réussi au moins pour les réponses humorales (LT4, LB).
Si les LT sont restaurés, il y de fortes chances que les réponses
cellulaires soient restaurées également puisque, outre les
LT4, elles mettent en jeu d’autres LT, les LT8. Cependant, avec seulement
six mois de recul, on ne sait pas si la thérapie va rester efficace
à long terme. Toutefois, le fait qu’on ait utilisé des cellules
souches qui sont immortelles peut le laisser espérer.
Conclusion
Ainsi, il s’avère possible de traiter un défaut immunitaire
sévère par introduction d’un gène « réparateur
» dans le patrimoine génétique de cellules souches
de façon à restaurer des LT fonctionnels capables à
la fois de répondre aux signaux de différenciation émis
par d’autres cellules et de stimuler notamment les LB à produire
des anticorps. Les résultats ne précisent cependant pas ce
qu’il en est de l’immunité cellulaire.
Sujet
Unicité génétique des individus et polymorphisme des espèces
Le syndrome du chromosome X fragile est la cause la plus fréquente
de retard mental héréditaire. Le retard mental, variable
d’un individu à l’autre, est associé à des anomalies
du visage plus ou moins prononcées. Le couple III-1/III-2, qui a
déjà un enfant malade, attend un autre enfant et se pose
la question de savoir s’il sera atteint ou non du syndrome du chromosome
X fragile.
À partir de l’exploitation des documents, recherchez l’origine
du phénotype malade chez IV-1 et indiquez si l’enfant à naître
sera atteint ou non du syndrome du chromosome X fragile.
Introduction
L’analyse de l’arbre généalogique de la famille où
un cas de syndrome de l’X fragile a déjà été
détecté permet de formuler des hypothèses quand aux
génotypes des membres de la famille et de calculer la probabilité
de son apparition chez les enfants à naître. L’analyse génétique
par Southern blot permet, en vérifiant les hypothèses, d’identifier
l’origine de la maladie, et de déterminer les génotypes.
Origine du phénotype malade
Le document 1 présente les différents allèles
du gène FMR1 dont le locus se trouve sur le chromosome X. On connaît
trois allèles caractérisés par le nombre de répétitions
de triplets CGG et seuls les allèles possédant plus de 200
répétitions sont trouvés chez les individus atteints.
Chez les individus non atteints, on trouve deux allèles, l’un possédant
moins de 54 répétitions, l’autre en possédant entre
54 et 200. Dans ce dernier cas, il existe une forte probabilité
que se produise une augmentation du nombre de répétitions
lors de la gamétogenèse et que soit transmis un allèle
du premier type. Nous appellerons ces allèles respectivement n1
(>200), n2 (54-200) et n3 (6-53). Un individu possédant l’allèle
n2 qui n’est pas morbide peut donc produire des gamètes portant
l’allèle n1 à l’origine de la maladie.
Le document 2 présente l’arbre généalogique de
la famille. L’enfant IV-2 est atteint alors que ses parents ne le sont
pas. Sachant que le gène est porté par le chromosome X et
que IV-2 est un garçon, on en déduit que IV-2 est hémizygote
et son génotype est Xn1/Y. Il a reçu le chromosome Y nécessairement
de son père III-1 qui n’étant pas atteint a une forte probabilité
d’être Xn3/Y, l’allèle malade provenant de la famille maternelle
puisqu’il est porté par X. Dans ce cas, la mère III-2, qui
a un phénotype normal, a dû produire des gamètes comportant
l’allèle n1. Elle possède donc soit n1 soit n2 qui a pu se
transformer en n1 lors de la gamétogenèse. Dans les deux
cas, c’est n1 qui est transmis à IV-1 y provoquant la maladie. Dans
ces conditions, la mère est soit hétérozygote Xn3/Xn2,
soit hétérozygote Xn3/Xn1. Dans ce dernier cas, la probabilité
que l’enfant IV-2 soit atteint est globalement de 1/4 et de 1/2 si c’est
un garçon. Une fille ne sera pas atteinte car il faudrait qu’elle
soit homozygote. Les résultats du Southern blot vont nous permettre
de vérifier ces hypothèses.
Southern blot et génotype du fœtus
La sonde utilisée associée à des enzymes de restriction
et à l’électrophorèse permet d’identifier les allèles
de FMR1. En effet, l’allèle n1 qui est clivé en un gros fragment
par l’enzyme donne une bande de 5,8 kb, les allèles n2 et n3, en
étant coupés en deux fragments dont un seul lie la sonde,
donnent une bande de 2,7 à 3,3 kb d’autant plus grande qu’il y a
plus de répétitions. L’enfant atteint, IV-1, montre une seule
bande de 5,8 kb correspondant à n1. Ceci confirme son génotype
Xn1/Y et l’origine de sa maladie. Le fœtus IV-2 présente une seule
bande de 2,8 kb. Il possède donc uniquement l’allèle n3,
le plus court. Si c’est une fille, elle est homozygote Xn3/Xn3 et si c’est
un garçon, il est hémizygote Xn3/Y. Il ne sera pas atteint
de la maladie. Les résultats du blot permettent de vérifier
les hypothèses faites ci-dessus. Ils confirment que le père
III-1 est Xn3/Y et que la mère, hétérozygote Xn3/Xn2
a produit un ovocyte comportant Xn1 responsable de la maladie. Les résultats
montrent également que la grand mère II-3 de l’enfant atteint
était homozygote pour l’allèle normal et que l’allèle
n2 doit donc provenir de II-2, le grand père qui l’a transmis sans
modification à sa fille III-2.
Conclusion
Les informations recueillies permettent donc d’exclure tout risque
de syndrome de l’X fragile concernant l’enfant à naître et
de reconstituer la transmission de l’allèle morbide au sein de la
famille. L’analyse de l’arbre ne permet qu’un calcul de probabilité
d’apparition de la maladie tandis que le résultat de l’analyse génétique
permet de déterminer avec certitude les génotypes.